«Je ne vois pas l’intérêt de payer la même cotisation que les autres alors que j’habite au premier étage et je n’utilise pas l’ascenseur»… A elle seule, cette déclaration résume l’état d’esprit qui règne chez des copropriétaires. Dans beaucoup de cas, le litige lié au non-paiement des charges communes tourne à un début de «guerre civile».
Dans certains immeubles, une riposte a été trouvée à ceux qui refusent de régler les frais de syndic: souvent le syndic condamne l’accès de l’ascenseur au premier étage ou met en place un système de clés ou de codes. Mais ces restrictions ne sont pas la solution idoine. La loi est claire: les entrées, les sous-sols et les ascenseurs font parties de la liste des parties communes citées dans la loi n°18-00 relative au statut de la copropriété des immeubles bâtis.
La culture de la copropriété et les charges et obligations qui vont avec ont du mal à s’installer.
En témoignent la dégradation des parties communes, le squat des cages d’escaliers ou encore de la terrasse de l’immeuble… Dans certains cas, la situation est telle qu’elle provoque des tensions… voire des conflits entre voisins. En particulier dans les immeubles qui comptent plusieurs copropriétaires.
«Plus le nombre de copropriétaires est élevé, plus il est difficile de recouvrer les créances. Il suffit que quelques-uns ne paient pas pour que les autres suivent», s’indigne un syndic. Une situation qui n’encourage pas non plus au recours à un syndic professionnel. Et ce même si la loi offre toutes les garanties au syndic (article 25 de la loi 18-00) pour le recouvrement des créances.
Celui-ci n’a même pas besoin de l’autorisation préalable de l’assemblée générale pour les réclamer par voie de justice. D’autant que l’assemblée générale des copropriétaires vote chaque année un budget prévisionnel et une provision pour la prise en charge des grands travaux d’entretien et les copropriétaires sont ainsi tenus de verser les provisions pour le financement du budget voté.
Comme le précise la loi, ces provisions sont exigibles le premier jour de chaque trimestre ou le premier jour de la période fixée par l’assemblée générale. En cas de nécessité, le syndic peut demander aux copropriétaires de verser une contribution supplémentaire lors de l’année en cours à charge de la soumettre à l’approbation de l’assemblée générale suivante.
Dans la pratique, même si le niveau des contributions fait l’objet d’un vote et que le syndic n’a pas besoin de l’aval de l’assemblée pour ester en justice, il y recourt. «En abordant le problème du recouvrement durant l’assemblée générale, le syndic engage en quelque sorte une ultime tentative pour amener les copropriétaires à honorer leur dette et aussi pour éviter les tensions», souligne un syndic. Cette démarche peut réussir comme elle peut se solder par un échec.
Ceci étant, la loi prévoit un ensemble de mesures pour assurer le recouvrement des cotisations. Ainsi, à défaut du versement dans les délais, les cotisations non encore échues deviennent immédiatement exigibles après mise en demeure par lettre recommandée, avec accusé de réception, restée infructueuse pendant plus de trente jours.
Si le copropriétaire n’y donne pas suite, le syndic engage la procédure d’injonction de payer. Celle-ci est prononcée par le président du tribunal de première instance sur la base d’un certain nombre de documents. Il s’agit notamment du procès-verbal de l’assemblée générale en vertu duquel est approuvé le montant des charges de l’année concernée et le relevé de compte des dettes du propriétaire débiteur approuvé par le syndic .
A cela s’ajoutent le certificat de propriété prouvant la quote-part revenant au propriétaire débiteur dans les parties communes ainsi qu’une attestation justifiant la mise en demeure du propriétaire. Le syndic dispose aussi de la possibilité d’actionner l’hypothèque forcée. Elle s’applique sur la partie privative et la quote-part dans les parties indivises. Elle est levée par ordonnance du président du tribunal une fois la dette acquittée.
Le législateur a tenu également à préciser que les créances du syndic bénéficient d’un privilège sur les meubles se trouvant dans l’appartement ou le local et sur la valeur locative. Ceci étant, les créances du syndic relatives aux charges communes sont prescrites si elles ne sont pas réclamées dans un délai de cinq ans, à compter de leur approbation par l’assemblée générale.