Immobilier: quand louer, quand acheter

La flambée de l’immobilier et les records observés dans les villes dynamiques cachent la réalité d’un secteur présentant de fortes disparités, et dont les prix restent soumis à la demande et aux taux d’intérêt.

Que ce soit pour se loger ou pour investir, l’immobilier reste la pierre angulaire du patrimoine des Français et l’objet de toutes leurs attentions. En moyenne, les biens immobiliers représentent 61% du capital des Français, mais bien plus pour les propriétaires. Près de 6 foyers sur 10 possèdent leur logement, qui constitue à lui seul 85% de leur patrimoine immobilier. En plus d’une résidence principale ou secondaire, 3 millions de Français possèdent au moins un bien locatif.

Un record de 970000 transactions en 2017
“L’année immobilière 2017 a été exceptionnelle sur tous les fronts”, observe Benoît Catel, directeur général du Crédit foncier. A Paris, les appartements anciens ont franchi le cap des 9000 euros le mètre carré, un bond de près de 9% en un an! Avec un record de 970000 transactions, le marché national est resté porté par les facilités de crédit permettant aux acheteurs de surenchérir toujours plus pour acquérir leur logement, dans un contexte de reprise économique alimentant la confiance dans l’avenir.

Avec 419000 logements neufs construits en 2017, ce segment se redresse. “Porté par l’accession à la propriété (+20% sur un an) et l’investissement locatif (+20%), le marché du neuf n’a cependant pas encore retrouvé les niveaux d’avant-crise”, précisent les experts du Crédit foncier.

Si le moral est au beau fixe dans la capitale et certaines métropoles prises dans le tourbillon haussier, d’autres marchés demeurent épargnés par la spéculation, quand ils ne sont pas à l’arrêt ou en plein marasme. Sur un an, les variations de prix des logements s’étalent ainsi de -14 à +14%, selon le dernier baromètre des notaires.

Des variations très inégales

Source: Notaires/L'Express

En plus de leur dynamisme propre, certaines villes bénéficient d’un “effet TGV”, comme Nantes, Rennes ou Le Mans, et surtout Bordeaux, dont les prix rattrapent ceux de Lyon. D’autres souffrent, en revanche, d’un certain attentisme, comme Dijon, Caen, Metz ou Limoges. Autre illustration de cette France à deux vitesses, l’écart se creuse de 1 à 10 entre Saint-Etienne (900 euros le mètre carré) et Paris.

La flambée des prix n’est pas une bonne nouvelle pour tout le monde
Si la baisse des prix est rarement acclamée, leur flambée n’est pas non plus une bonne nouvelle pour tout le monde. Même s’ils font la culbute en revendant leur logement, beaucoup de propriétaires déménagent pour plus grand, donc plus cher. Quant aux investisseurs, la rentabilité de leur achat s’érode avec la hausse des prix.

A Paris, les loyers des nouvelles locations approchaient 25 euros le mètre carré par mois en 2017, contre environ 15 euros au début des années 2000, quand les logements s’échangeaient autour de 2700 euros le mètre carré. Pour ceux qui ont acheté il y a dix-huit ans, la plus-value moyenne atteint 240%. Mais pour un investisseur d’aujourd’hui, la rentabilité locative brute des logements parisiens (avant frais, travaux et impôts) est réduite à 3,3%, soit deux fois moins que pour les investisseurs de l’an 2000.

Est-ce intéressant? Raisonnable? Trop cher? Par rapport à quoi? Les enjeux sont différents selon qu’on achète pour se loger ou pour investir, mais on peut évaluer l’intérêt financier d’un achat par rapport aux solutions alternatives: être locataire et placer son argent ailleurs. Les taux d’intérêt sont au coeur de cette comparaison. D’abord parce que la plupart des achats sont financés avec un prêt. Grâce à la baisse des taux, le même budget permet d’emprunter plus, ce qui alimente mécaniquement la hausse des prix.

Début 2018, les prêts à taux fixe sur quinze ans se négociaient à un taux moyen de 1,5%, selon le courtier Empruntis, contre 3,1% début 2013. En remboursant 1000 euros par mois pendant quinze ans (hors assurance), on peut emprunter aujourd’hui 161100 euros, soit 12% de plus qu’il y a cinq ans pour le même budget.

L’effet taux d’intérêt
Ensuite, les taux d’intérêt influencent les prix de l’immobilier comme pour tous les placements. Quand la Banque centrale européenne (BCE) réduit à zéro celui des liquidités, et même en dessous comme c’est le cas depuis 2015, les autres actifs deviennent comparativement plus attrayants, ce qui fait grimper leur prix. Même si les risques sont bien différents entre les emprunts d’Etat, les actions et l’immobilier, les investisseurs sont prêts à les payer plus cher quand les taux d’intérêt baissent, tant que leurs revenus procurent des rendements plus élevés.

Le premier critère pour décider d’acheter ou de louer est donc la comparaison des loyers aux prix. Ce ratio est de 5 à 7% dans l’ancien, en province ou en Ile-de-France à plus d’une demi-heure de Paris, contre 3,3% en moyenne dans la capitale.

En théorie, moins la rentabilité locative est élevée, moins l’achat est intéressant. Mais il faut tenir compte d’autres paramètres, tels que la hausse des loyers (à payer quand on est locataire et à encaisser quand on est propriétaire), le supplément de charges et de taxes pesant sur le propriétaire (travaux et charges, taxe foncière, frais de notaire, assurances…), et surtout la valeur de revente du bien, comparée à la performance d’autres placements.

“La hausse des prix dans l’ancien devrait se poursuivre”
En mettant ces paramètres en balance, il s’avère souvent plus intéressant d’acheter son logement que de louer. Mais pas toujours. Ceux qui ont acheté à Paris au pic de 1991 ont dû attendre 2002 pour revendre au même prix, c’est-à-dire à perte compte tenu des frais d’achat. Leur capital aurait doublé sur la même période s’ils l’avaient placé en assurance-vie… Pour 2018, “la hausse des prix dans l’ancien devrait se poursuivre, prédisent les experts du Crédit foncier, mais à un rythme moindre de 2,5% en moyenne nationale”. Au-delà, les perspectives de l’immobilier restent suspendues à l’évolution des taux d’intérêt.

La hausse à Paris
Prix en € par m2

Source: Notaires/L'Express

Ce contexte continue de soutenir l’investissement locatif neuf, notamment avec la reconduction de la loi Pinel, qui permet de bénéficier d’une réduction d’impôt correspondant à 2% du prix d’achat de son bien pendant neuf ans, soit 18% au total, puis 1% par an pendant trois ans, soit 21% de remboursement de son achat par le fisc pour un engagement de location de douze ans.

En 2017, les investissements dans ce cadre de défiscalisation ont progressé de 20%, selon le Crédit foncier. Mais ces investissements voient leur rentabilité écornée par la hausse des prix, sachant que les logements neufs se vendent entre 30 et 50% plus cher que les logements anciens, sans que leurs loyers soient réellement plus élevés.

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