Immobilier : pour les promoteurs, le coût de production a progressé entre 10% et 20% (FNPI)

La guerre en Ukraine a catalysé la hausse des prix des intrants dans la construction immobilière. Ciment, verre, aluminium, tous les composants ont vu leurs prix grimper et s’aggraver depuis le début du conflit. Pour les promoteurs, le coût de revient d’un projet classique a progressé jusqu’à +25%. Les marges sont sous pression et les prix de vente ne peuvent que difficilement être augmentés étant donné le pouvoir d’achat et la faible demande.

Dès le début de l’année 2022, les professionnels de la promotion immobilière prévoyaient une croissance molle pour cette année, du fait de l’incertitude régnant sur le marché. Le secteur connaissait déjà une incertitude et un manque de visibilité du fait de la fin des conventions sur le logement social depuis la fin d’année 2020.

Un analyste de la place nous expliquait alors, « que tout le secteur est en attente de voir ce que va annoncer le gouvernement concernant l’immobilier, si toutefois il y a une annonce. Je pense qu’en attendant, la croissance du secteur devrait être plutôt calme. La fin des abattements sur les droits d’enregistrement a calmé la demande et les promoteurs de leur côté ont connu la fin des avantages fiscaux sur le logement social ».

Depuis le début de l’année, l’incertitude et les difficultés se sont encore détériorées suite à l’inflation galopante et la forte hausse des intrants dans le secteur. Ciments, rond à bétons, verre, aluminium… tous les intrants utilisés par les acteurs de la promotion immobilière et du BTP en général affichent au moins des hausses de tarifs à deux chiffres. En plus de cela, se rajoutent les perturbations logistiques mondiales qui impactent les promoteurs via un fort allongement des délais de livraison des projets.

Dans ce contexte compliqué pour le secteur entier, le chef du gouvernement a annoncé au parlement, le 18 avril dernier, avoir signé une circulaire avec plusieurs mesures d’aide visant à atténuer l’impact de la hausse des prix sur les entreprises titulaires de marchés publics. Pour Youssef Ibn Mansour, ancien président de la Fédération Nationale des Promoteurs Immobiliers (FNPI), « les mesures prises par le gouvernement visent à accompagner les opérateurs de tout le secteur y compris l’entreprise de construction, les producteurs de matériaux, etc… Ce sont des mesures d’accompagnement dans un contexte difficile et c’est une bonne chose. Mais il faut garder en tête que les problématiques de la production, de l’offre et de la demande sont toujours là ».

Des intrants et des délais d’approvisionnement qui explosent

Avec la reprise économique mondiale et la forte demande qui en a découlé, l’inflation s’était déjà manifestée depuis plusieurs mois. Mais la donne s’est accélérée depuis le début de la guerre en Ukraine. Aujourd’hui, par rapport à une année normative, « le coût de production a augmenté de 10% à 20% » nous confie Mustapha Allali, vice-président de la FNPI.

« La guerre en Ukraine a catalysé la hausse des prix, notamment avec la flambée des carburants et donc des coûts du transport. Cela a eu un coût supplémentaire sur tous les matériaux. Le verre par exemple a augmenté de près de 200%, l’aluminium a grimpé de 60% ». Naturellement, tout ce qui est importé a connu une sensible hausse. « Tout ce qui touche aux finitions, comme le verre, les fenêtres, le profilé d’aluminium ont considérablement augmenté. Souvent, ce sont des matériaux qui sont importés et c’est une inflation à l’import que subi le secteur » explique Youssef Ibn Mansour.

Au-delà de la contrainte prix, c’est également la disponibilité des matières premières qui commence à devenir problématique. « Les chaînes logistiques internationales sont perturbées et approvisionner le Maroc comme avant devient complexe. Il y a un souci de disponibilité avec moins de production effectuée dans certains pays donc cela se répercute sur les conditions de production » explique-t-il. En général, des livraisons de produits en provenance de France ou d’Espagne mettaient, en temps normal deux semaines à parvenir… et 1 ou 2 mois actuellement. Pour le verre, cela peut même atteindre les 6 à 8 mois avant livraison.

Les hausses de prix provoquent également des pressions notables sur les marges des promoteurs. « Quand on signe des compromis de vente à des prix où la situation était globalement normale et qu’aujourd’hui, le coût de revient peut augmenter jusqu’à 20%, c’est une hausse que ne peut pas supporter le client final. Le promoteur ne peut pas revenir sur des engagements déjà signés » explique Mustapha Allali.

Les acteurs du BTP veulent revoir leurs contrats à la hausse

Pour le vice-président de la FNPI, l’un des problèmes qui émergent est que les entreprises de BTP ayant des contrats avec les promoteurs pour effectuer la construction, souhaitent revoir leurs contrats à la hausse.

« Cela menace le secteur et provoquera certainement des arrêts de chantiers. Certaines entreprises de BTP (en charge du gros œuvre et œuvre secondaire, ndlr) menacent de stopper les chantiers si les promoteurs ne revoient pas les contrats à la hausse. Car ces contrats ont été signés sur des bases avant l’envolée des prix. Or cela n’est pas accepté par les promoteurs étant donné qu’ils sont engagés avec les clients dans des ventes à des prix pré-crise » explique Mustapha Allali.

Qui plus est, une éventuelle hausse ne ferait qu’impacter l’acheteur déjà affaibli par un pouvoir d’achat érodé. Qui plus est, l’acheteur ne dispose plus d’incitations fiscales comme c’était le cas jusqu’à fin juin 2021 avec l’abattement de 50% des droits d’enregistrement pour les biens allant jusqu’à 4 MDH et une exonération totale concernant le logement social. D’ailleurs cette année, une croissance globalement molle est attendue sur le secteur immobilier.

Source : leboursier.ma

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