Habitat: Comment relancer une machine grippée

Réflexion sur un nouveau mode opératoire
La tutelle devra capitaliser sur les acquis et innover pour la phase II
Logement abordable, favoriser l’investissement, les perspectives de développement… Les défis

Relancer un secteur de l’immobilier en crise n’est pas une affaire facile. Abdelahad Fassi Fehri, ministre de l’Aménagement du territoire, de l’Urbanisme, de l’Habitat et de la Politique de la ville et son staff devront faire preuve d’ingéniosité pour réussir cette phase tant attendue à la fois par les promoteurs que les acquéreurs.

Améliorer la qualité et l’attractivité du secteur, faciliter l’accès au logement tant pour les urbains que les ruraux, tracer les perspectives de développement du secteur, favoriser l’investissement, durabilité, réduire les disparités régionales… Tels sont les nouveaux enjeux.

Certes des contraintes persistent mais il y a aussi des opportunités à saisir pour sauver tout un secteur en crise. Actuellement, il y a près de 1,5 million de demandeurs de logements en attente de bonnes offres. Les études et enquêtes réalisées par la tutelle démontrent également qu’il y a une émergence de nouveaux types de demandes.

Ainsi plus de 40% des besoins sont orientés vers l’habitat social, 13% ciblent le locatif et 14% des clients sont à la recherche des logements dédiés à la classe moyenne.

«Les programmes en cours étant presque arrivés à terme alors que la demande en logements persiste, de nouveaux efforts sont à déployer pour garantir un marché efficient et répondre à des besoins encore latents. Ceci à travers l’initiation de mesures susceptibles de redynamiser le secteur de l’habitat», souligne la tutelle.

La nouvelle vision devra absolument rompre avec le passé, tout en capitalisant sur les acquis, voire réfléchir à des actions et solutions innovantes et efficaces. Ainsi, pour la première fois, la tutelle vient d’ériger en priorité la question de l’abordabilité en termes de logements.

«Le défi majeur à relever est la mise en place de programmes adaptés au contexte marocain permettant de donner un nouveau souffle au marché immobilier en corrélation avec les besoins et les attentes des ménages», précise le ministère de la tutelle. Reste qu’un logement ne peut être considéré comme abordable qu’en fonction de la maîtrise de toute sa chaîne de production et de ses coûts (procédures administratives, foncier, financement, matériaux, exécution des travaux, intervenants, taxes et impôts…).

Tout le monde s’accorde à dire que ces défis ne peuvent être relevés que si le secteur s’engage dans une mutation profonde de ses modes opératoires. Il va donc falloir innover dans la réflexion et remodeler l’action publique pour mettre à la disposition des Marocains un logement abordable en adéquation avec leurs capacités financières ainsi que leurs attentes en termes de qualité et de confort de vie.

Autre tendance, les ménages sont devenus plus exigeants en termes de qualité de finition, de standards… Pour ce faire, tous les acteurs relevant des secteurs publics et privés devront s’impliquer davantage pour sortir de cette impasse.

Les promoteurs sont appelés à revoir leur processus de production et leur business modèle pour mieux comprendre les attentes et y apporter les bonnes réponses.

L’Etat de son côté est tenu d’améliorer l’efficacité de l’action publique en la  matière. Ce qui passe aussi par l’identification de nouveaux mécanismes de réduction du coût du logement (foncier, matériaux de construction, fiscalité, frais de gestion…), la promotion de nouvelles formes d’habitat participatif et solidaire (coopératives, amicales et associations d’habitation) pour une meilleure diversification de l’offre de logement, notamment celle destinée à la classe moyenne.

La tutelle a également la lourde responsabilité de créer les conditions appropriées pour une relance effective du locatif résidentiel, de recadrer le système d’aide publique dans le secteur de l’habitat, de favoriser la mixité sociale et fonctionnelle dans le montage des programmes d’habitat ou encore d’optimiser la mobilisation du foncier public dans le cadre d’une approche efficiente.

Le ministère devra aussi œuvrer à réinjecter  le parc vacant  dans le marché de l’immobilier et de renforcer le tissu des entreprises de promotion immobilière, toutes catégories confondues, en vue de professionnaliser davantage l’acte de bâtir et les métiers de la ville.

En termes de financement, les discussions avec les banques ont porté sur les outils et les contraintes liés à l’octroi de crédits bancaires, le système fiscal en vigueur ainsi que les mesures d’amélioration des systèmes aussi bien financier que fiscal de manière à insuffler une nouvelle dynamique au secteur.

Le département de l’Aménagement du territoire, de l’Urbanisme, de l’Habitat et de la Politique de la ville s’attelle également à l’amélioration des outils d’aide et de soutien (financement, fonds de solidarité et de garantie, assurance…).
Jusqu’à présent, l’habitat rural n’a jamais été une priorité. Toute l’attention était portée sur les villes et les nouveaux pôles urbains.
Sur ce registre, la tutelle a amorcé des pistes de réflexion en vue d’adopter une démarche partagée de développement et d’amélioration des conditions d’habitabilité en zone rurale.

Le foncier fait également l’objet de discussions très avancées, notamment en tant qu’enjeu et assise primaire du développement des territoires. La régulation du marché foncier ainsi que le domaine privé de l’Etat sont également des actifs et des leviers stratégiques au service du développement socioéconomique.

L’encadrement juridique devra être vu de fond en comble. La tutelle travaille sur des propositions innovantes, efficaces et souples susceptibles de rétablir la confiance et de délimiter les responsabilités pour une meilleure  gouvernance.

L’accès à l’information enfin déverrouillé

Bon point pour le ministre de l’Habitat, Abdelahad Fassi Fehri. Il a instauré un dialogue et des concertations à large échelle pour recueillir des recommandations qui serviront de base au nouveau plan de sauvetage tant attendu visant à faire sortir le secteur de l’immobilier de son marasme. Le ministre a mis à la disposition des différents intervenants et même des journalistes des informations chiffrées et actualisées. Ce qui n’était pas le cas du temps de son prédécesseur qui avait quasiment bloqué, durant ses deux mandats, l’accès à l’information laissant libre cours aux spéculations et aux interprétations.
Les résultats des réflexions seront dévoilés lors de la 2e session du Conseil national de l’habitat (CNH) qui sera redynamisé après 2 ans de mise en veilleuse. Les ateliers ont connu la participation de plus de 1.000 participants. Y ont pris part des ministres, des représentants de différents départements ministériels, des établissements publics, des présidents de banques, de fédérations et ordres professionnels, des universitaires, des experts, des associations de la société civile et autres acteurs intervenant dans le domaine du logement. Espérons que cette mobilisation massive se traduira dans le futur proche par de vrais chantiers réalisables.

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