L’immobilier est en mauvaise passe. Le vice-président de la Fédération nationale des promoteurs immobiliers, Rachid Khayatey, revient sur les tenants et aboutissants de cette crise et nous fait part de ses recommandations capables de relancer le secteur.
L’Observateur du Maroc et d’Afrique : Comment s’est porté le secteur en 2018 ? Et comment s’annonce 2019 ?
Rachid Khayatey: Le secteur va mal. Recul de la production, baisse de la demande, stocks invendus…, tous les indicateurs sont au rouge. Tous les segments sont concernés. Concrètement, la promotion immobilière souffre aujourd’hui d’une sur-taxation. Tous les promoteurs se plaignent. Figurez-vous qu’aujourd’hui, les taxes (conservation foncière, taxes des régies…) sont devenues égales aux coûts des travaux. Entre cette année et l’année dernière, il y a des taxes qui ont augmenté de 100% voire même plus. Il faut savoir que la conservation foncière est devenue le premier contributeur en matière de ressources fiscales. Elle a même dépassé l’OCP et Maroc Télécom.
Rien que cet indicateur est alarmant. Aujourd’hui, nous n’avons pas de crise d’offre, de terrains ou de surproduction. Nous avons une crise de taxes. Non seulement, la taxe paralyse le secteur, mais nous n’avons jamais vécu un blocage au niveau des autorisations comme c’est le cas aujourd’hui. De plus, le secteur bancaire tourne actuellement le dos aux acquéreurs et aux promoteurs sans parler de l’augmentation des taux pratiqués. S’ajoutent à tous ces facteurs les lenteurs administratives, la stagnation au niveau de l’octroi des terrains… Notez que les prix sont arrivés aux plus bas niveaux et ne peuvent baisser plus. Mais la demande ne suit pas en raison de la baisse du pouvoir d’achat.
La loi de finances 2019 répond-elle à vos attentes ?
Pas du tout. Aucune mesure n’est prévue pour redynamiser le secteur. Au contraire, certaines mesures sont « contreproductives » et pourraient même faire perdurer la crise que connait le secteur. Toutes les revendications exprimées par la profession sont restées lettre morte. Les assises de la fiscalité seraient une opportunité pour mettre à plat tout le système fiscal du secteur. Par exemple, il faut revoir la taxe sur les terrains non bâtis, la TPI, et toutes ces taxes qui asphyxient les promoteurs.
Quelles sont vos recommandations pour donner un nouveau souffle au secteur ?
Nous préconisons l’élargissement de la base de la contribution fiscale de manière à ce que le secteur informel soit «formalisé ». En gros, il faut baisser les taux d’imposition et élargir la base. Seuls 8% des sociétés paient 80% des impôts. C’est anormal. Donc, on plaide pour une équité fiscale. Au niveau de la promotion immobilière il y a le cas des coopératives déguisées qui deviennent des promoteurs immobiliers. Elles ont des clients et non pas des adhérents et échappent à toute fiscalité profitant de la juridiction qui favorise ce genre de pratiques. Le code général de la construction doit absolument voir le jour aujourd’hui. Avec un million d’emplois, la promotion immobilière est le deuxième pourvoyeur d’emplois au Maroc. Il est temps d’agir pour sauver le secteur et ses emplois. On tire la sonnette d’alarme !